Que signifie vraiment le label MSC sur les étiquettes de poisson?

Paris, 10 juin 2025 (AFP) – Du grand Carrefour de banlieue au Picard de centre-ville en passant par l’Intermarché de zone périurbaine, le label MSC tamponne de nombreuses boîtes de thon, poissons panés ou surimi.

Mais ce label « Marine Stewardship Council », avec son poisson bleu et blanc en logo et son inscription « Pêche durable », ne garantit pas l’exclusion de plusieurs pratiques considérées comme néfastes pour la biodiversité marine.

– MSC, omniprésent

Né en 1997 d’une initiative de l’ONG WWF et du groupe Unilever, le label MSC est de loin le plus répandu, avec quelque 2.300 références labellisées en France.

Sur son site internet, ce label assure garantir « une gestion efficace des pêcheries », un « impact environnemental minimisé » et des pêches effectuées dans « des stocks de poisson durables ».

Pour cela, le label a édicté plusieurs dizaines de critères « scientifiques ». Par exemple, concernant l’état du stock de poissons sur le lieu de pêche, il doit être au moins « fortement probable » que ce dernier soit au-dessus du seuil de renouvellement. De même, la pêcherie labellisée « ne doit pas cibler » les oiseaux, amphibiens, reptiles ou encore mammifères.

Mais le MSC est critiqué.

L’ONG de défense des océans Bloom estimait par exemple en 2023 que « 83% des volumes certifiés par le MSC proviennent de pêcheries destructrices ».

Ses détracteurs décrivent le label comme permissif. Bloom pointe l’utilisation de chalutage en eau profonde, de « dragage hydraulique » ou de dispositifs de « concentration de poissons » (DCP), parmi les pêches certifiées par le label.

Frédéric Le Manach, directeur scientifique de Bloom, déplore « un label par et pour l’industrie pour pouvoir afficher le message que toute la pêche est durable ».

« En effet, la drague, un chalut de fond, le DCP, ça peut être néfaste », concède Amélie Navarre, directrice du programme MSC France. Le label « se base sur le code de conduite d’une pêche durable de la FAO, qui stipule qu’un programme de certification est non discriminatoire », explique la dirigeante.

Raison pour laquelle le MSC n’interdit « aucun engin de pêche, à part le poison et l’explosif ». « On part du principe que cela peut être bien géré », ajoute-t-elle.

– Peu de petites pêches

« Le label MSC a quand même un certain nombre d’avantages: il s’aligne sur les règles de pêche européenne, souvent non appliquées, c’est une première garantie », nuance Didier Gascuel, professeur en écologie marine à l’Institut Agro de Rennes.

Mais ce professeur critique surtout les difficultés « d’accès à ce label pour les petits pêcheurs ».

En effet, pour être certifié par MSC, une pêcherie doit faire appel à un audit indépendant et obtenir un score global minimum de 80 sur 100.

« Cela coûte cher, c’est compliqué. Or ce sont souvent les petites pêches qui sont les plus durables », affirme Didier Gascuel. Cet angle mort, juge-t-il, conduit à une situation paradoxale où « le consommateur peut avoir face à lui deux produits, l’un labellisé, l’autre non, et où c’est celui qui n’est pas labellisé qui s’avère le plus durable ».

– Petits labels alternatifs

Aucun label ne concurrence le MSC en France en matière de volumes.

Parmi les outsiders figure l’écolabel pêche durable, public, lancé par FranceAgriMer en 2014 avec 36 critères (écosystème, environnement, social, qualité). Mais il ne couvre que huit pêcheries en France et souffre d’un « volume de produits labellisés extrêmement faible », souligne Didier Gascuel.

D’autres sont principalement géographiques.

Ils trouvent grâce aux yeux de Frédéric Le Manach parce qu’ils sont « simples et binaires », donc facilement vérifiables. Prenant l’exemple du « Bar de ligne de la Pointe de Bretagne », il indique qu' »il faut qu’il soit pêché à la ligne, sur un lieu précis ». Ainsi « cela donne un label qui veut dire quelque chose », salue-t-il.

Pour atteindre l’objectif d’une pêche durable, Didier Gascuel prône « des processus alternatifs ou complémentaires aux labels, un système d’étiquetage environnemental de durabilité des produits de la pêche ».

Dans un article paru dans la revue Nature, des scientifiques ont édicté onze recommandations pour une pêche durable, parmi lesquelles « pêcher moins », « limiter la taille des bateaux », ou encore « interdire l’accès aux espèces et aux zones les plus vulnérables ».

hrc/ico/er

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