Reconduit mi-novembre pour les quatre mois d’hiver, l’accord sur le corridor maritime depuis trois ports d’Ukraine a soulagé les marchés, et entraîné un mouvement de détente malgré une volatilité toujours forte.
Depuis, les cours du blé se sont « dégonflés » et sont redescendus « proches des plus bas de novembre, et quasiment sur les niveaux d’août » 2022, explique Gautier le Molgat, analyste au cabinet Agritel.
A 15H30 GMT mercredi, le blé s’échangeait à 326 euros la tonne sur Euronext pour l’échéance de décembre 2022, et à 312,25 euros la tonne pour l’échéance plus lointaine de mars 2023, sur laquelle la baisse est plus marquée.
Sur un marché américain ralenti en fin de semaine par les festivités de Thanksgiving, le blé d’hiver (SRW) est lui-aussi retombé à son plus bas niveau depuis trois mois pour le contrat rapproché, avant de remonter légèrement depuis mardi.
« Le prolongement du corridor a rassuré, mais les cours ne peuvent pas descendre trop bas car on reste dans une situation de guerre », souligne Damien Vercambre du cabinet Inter-Courtage.
Par ailleurs, la contestation vis-à-vis du système politique chinois, après trois années de dures restrictions sanitaires contre le Covid, génère une « grande nervosité sur les marchés, dans un contexte de plus en plus impacté par la récession économique », selon Agritel.
Ces manifestations, qui se poursuivaient mercredi, « ont fait très peur aux opérateurs, car la Chine est l’un des principaux moteur de la demande de matières premières », maïs, soja ou encore blé, souligne Damien Vercambre d’Inter-Courtage.
« Les investisseurs, qui avaient parié sur une hausse des cours, ont liquidé des positions » à la hausse, tirant les prix vers le bas, explique Michael Zuzolo de Global Commodity Analytics and Consulting.
Malgré ces inquiétudes, le maïs et le soja résistent, ce dernier étant même monté mardi à son plus haut niveau depuis deux mois à Chicago du fait d’une demande soutenue.
– Récoltes dans l’hémisphère sud –
La demande de céréales et notamment de blé se maintient sur le marché international, notamment en Afrique et au Moyen-Orient, avec des appels d’offre de l’Algérie, la Tunisie, ou encore l’Égypte ces derniers jours.
Même si le blé américain est redevenu compétitif, « la Russie et l’Ukraine restent les références du marché. C’était le cas avant la guerre et ça l’est resté, en particulier avec le corridor », précise Arlan Suderman de StoneX.
La Russie, dont la récolte a été annoncée comme pléthorique, est toujours très bien placée sur ces appels d’offre, et le prolongement de l’accord favorise ses exportations de céréales mais aussi d’engrais.
Outre le corridor, « les Ukrainiens ont trouvé d’autres façons d’exporter: par le train en direction de la Pologne », ou en construisant des terminaux céréaliers sur le Danube, explique Damien Vercambre.
Certains pays de l’hémisphère sud, en parallèle, entament leurs récoltes de céréales.
En Australie, les dégâts causés par des inondations sur la côte est mi-novembre suscitent des inquiétudes sur la qualité des grains.
Du côté de l’Argentine, le volume de blé récolté devrait pâtir de la sécheresse: la bourse des céréales de Bahía Blanca (sud) a annoncé lundi s’attendre à une récole amputée de plus de 30%.
Pour stimuler les exportations, le gouvernement argentin a réactivé un projet garantissant un effet de change positif aux agriculteurs lors de la conversion des dollars en pesos, explique Alan Suderman, « très lucratif pour les producteurs ».
En septembre, il avait permis aux acheteurs chinois de « mettre la main sur 3 millions de tonnes de soja argentin bon marché ».
Le colza, pour sa part, se maintient sous la barre symbolique des 600 euros la tonne sur Euronext, dans le sillage du pétrole.
Les prochaines semaines devraient être marquées par un ralentissement des marchés avant les fêtes, une période souvent propice à une « accélération des cours », prévient toutefois Jason Britt, de Central State Commodities.
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