Six mois après Chido, la végétation repousse fragilement à Mayotte

Ouangani (Mayotte), 15 juin 2025 (AFP) – Les ylangs-ylangs embaument à nouveau la parcelle agroforestière d’Hassani Soulaïmana, à Mayotte. « C’était inespéré », souffle cet exploitant, six mois après le passage du cyclone Chido qui a dévasté son terrain dans le centre de l’archipel français de l’océan indien.

La parcelle a retrouvé des couleurs, d’autant plus éclatantes que l’ombre créée par la forêt environnante n’est plus qu’un lointain souvenir.

Ylang-ylangs, bananes, curcuma, basilic, bambous, fleurs… « Revoir les plantes qui donnent, les graines qui repoussent, c’est extraordinaire », se réjouit celui qui avait découvert au même endroit un cimetière d’arbres centenaires en décembre dernier, quelques heures après le cyclone qui a fait 40 morts et causé 3,5 milliards d’euros de dommages dans le département le plus pauvre de France.

Comme sur la parcelle d’Hassani, le vert a de nouveau sa place dans le paysage, même si les forêts restent pour la plupart clairsemées. « C’est sûr que depuis maintenant plusieurs mois, Mayotte a reverdi », constate Michel Charpentier, président de l’association environnementale Les Naturalistes.

La saison des pluies et la lumière laissée par les arbres tombés ont aidé. Mais le responsable associatif reste prudent: « On ne pourra vraiment dresser un bilan qu’à la fin de la saison sèche ». Certaines plantes risquent de ne pas survivre à cette période qui dure d’avril à octobre.

– Espèces exotiques envahissantes –

Les plantes endémiques ayant commencé à repousser sont confrontées à un autre danger. « Les espèces exotiques envahissantes (EEE) repartent bien », s’inquiète Jérémy Amiot, responsable de l’antenne locale du Conservatoire du littoral (CDL), un établissement public chargé de la préservation des côtes françaises.

Michel Charpentier constate également que ces espèces exotiques envahissantes « ont déjà commencé à recouvrir une partie des zones déboisées, en particulier des lianes ». Ces espèces non endémiques poussent plus rapidement et privent les espèces locales des éléments nécessaires à leur croissance.

Sur les 2.800 hectares de forêt appartenant au CDL, certaines zones sont la cible d’opérations d’arrachage pour freiner ce phénomène, comme les abords du lac Karihani.

« On en voit plein partout », déplore le directeur de l’association qui gère le site, Emilien Dautrey, citant notamment le tabac boeuf.

Il affirme même avoir vu apparaître des espèces exotiques qui n’étaient pas présentes autour du lac avant le cyclone. « L’acacia mangium n’était pas là avant Chido, il a dû être apporté par le vent », regrette-t-il, constatant qu’à côté, la forêt à « énormément diminué ».

Ce type d’apparition fait parfois le bonheur de certains. Sur sa parcelle, Hassani a vu grandir un nouveau papayer et pousser des espèces de tomates qu’il n’avait jamais vues en vingt ans de métier. « C’est Chido qui l’a planté », s’amuse-t-il en désignant un pied de tomates cerises.

Du côté des associations environnementales, l’heure est encore au diagnostic avant des interventions d’ampleur. Arracher les EEE représente « un travail énorme » et « laisse le sol exposé à la lumière du soleil, ce qui risque de faire brûler les jeunes pousses », tempère Michel Charpentier.

– Replantations en 2026 –

Concernant les replantations, elles sont envisagées dans certaines zones où la résilience de la nature ne suffira pas. Selon Jérémy Amiot, il va falloir attendre novembre 2026 pour commencer ces opérations, le temps que la phase d’étude soit terminée. D’autant plus que « les pépiniéristes ont tous perdu leurs plants ».

Pour l’heure, il faut essentiellement protéger ce qui reste. « J’ai vu des forêts transformées en champ de manioc », confie Emilien Dautrey. Le déboisement engendré par Chido a en effet laissé place à des cultures illégales.

Mais les moyens manquent sur le terrain pour lutter contre ce type d’occupation, selon Michel Charpentier qui regrette que la protection de l’environnement ne soit pas incluse dans le projet de loi récemment annoncé par le gouvernement français pour la refondation de Mayotte: « Les écosystèmes sont nécessaires à la population. La forêt, c’est la ressource en eau. Le récif et la mangrove sont impératifs pour protéger le littoral ».

Articles connexes

Séisme de magnitude 6,1 près de la ville de Callao au Pérou

Lima, 15 juin 2025 (AFP) - Un séisme de magnitude 6,1 a été enregistré dimanche près de la ville portuaire de Callao, au...

Polaris 25, exercice militaire aéro-maritime de grande ampleur entre la France et ses alliés

Rennes (France), 13 juin 2025 (AFP) - Avions abattus, bateaux torpillés, attaques de drones ou de nageurs de combat: quelque 3.000 militaires et...

Libéré, le leader kanak Christian Tein s’exprimera mercredi

Mulhouse, 13 juin 2025 (AFP) - Le leader indépendantiste kanak Christian Tein, qui a quitté jeudi soir sa prison de Mulhouse-Lutterbach (Haut-Rhin) où...

Libération de Christian Tein: indignation des loyalistes, soulagement chez les indépendantistes

Nouméa, 13 juin 2025 (AFP) - "Incompréhensible", "choquante" pour les uns, "victoire du droit" pour d'autres: la décision de la cour d'appel de...

Wallis-et-Futuna: les enseignants du primaire désormais intégrés à la fonction publique d’État

Paris, 13 juin 2025 (AFP) - Un décret officialisant l'intégration des enseignants du premier degré de Wallis-et-Futuna, collectivité française du Pacifique, à la...

Le Japon juge « inacceptable » que la Chine le rende responsable d’un incident aérien

Tokyo, 13 juin 2025 (AFP) - Le ministre japonais de la Défense a jugé vendredi "inacceptables" les accusations chinoises imputant à Tokyo un...

Plus de lecture

ACTUALITÉS

Le Bénin et la mer

Découvrez GRATUITEMENT le numéro spécial consacré par Marine & Océans au Bénin et la mer

N° 282 en lecture gratuite

Marine & Océans vous offre exceptionnellement le numéro 282 consacré à la mission Jeanne d’Arc 2024 :
  • Une immersion dans la phase opérationnelle de la formation des officiers-élèves de l’École navale,
  • La découverte des principales escales du PHA Tonnerre et de la frégate Guépratte aux Amériques… et de leurs enjeux.
Accédez gratuitement à la version augmentée du numéro 282 réalisé en partenariat avec le Centre d’études stratégiques de la Marine et lÉcole navale

OCÉAN D'HISTOIRES

« Océan d’histoires », la nouvelle web série coanimée avec Bertrand de Lesquen, directeur du magazine Marine & Océans, à voir sur parismatch.com et sur le site de Marine & Océans en partenariat avec GTT, donne la parole à des témoins, experts ou personnalités qui confient leurs regards, leurs observations, leurs anecdotes sur ce « monde du silence » qui n’en est pas un.