Après le classement sans suite en août 2019 d’une première enquête par le parquet national financier (PNF), Anticor a déposé le 4 décembre une plainte avec constitution de partie civile auprès du doyen des juges d’instruction, pour qu’un magistrat instructeur reprenne les investigations, selon Me Jean-Baptiste Soufron.
« Le juge d’instruction destinataire de la plainte d’Anticor l’a communiquée le 2 mars 2020 au parquet national financier pour réquisitions. Ces dernières sont en cours de finalisation et seront adressées prochainement au magistrat instructeur », a déclaré le procureur national financier, Jean-François Bohnert, à l’Express.
Le PNF avait ouvert son enquête préliminaire après la publication de plusieurs articles, notamment de Mediapart, qui avaient mis en avant en 2018 les liens familiaux et professionnels étroits entre M. Kohler et l’armateur italo-suisse, fondé et dirigé par les cousins de sa mère, la famille Aponte. MSC est un important client de l’entreprise STX France (aujourd’hui renommé Chantiers de l’Atlantique) qui gère les chantiers navals de Saint-Nazaire.
Après avoir siégé au conseil d’administration de STX France entre 2010 et 2012 en tant que représentant de l’État alors qu’il travaillait à l’Agence des participations de l’Etat, M. Kohler avait voulu, à deux reprises, rejoindre MSC, à chaque fois après avoir exercé des fonctions au sein de cabinets ministériels à Bercy.
La première fois, en avril 2014, la commission de déontologie, l’instance chargée de contrôler le départ des agents publics dans le secteur privé, s’était opposée à sa demande.
Mais en août 2016, quand Emmanuel Macron a quitté le ministère de l’Economie, Alexis Kohler a finalement obtenu le feu vert de la commission et rejoint MSC Croisières au poste de directeur financier.
Quelques mois plus tard, à l’élection de M. Macron en mai 2017, il avait été nommé à l’Elysée.
Lors de ces consultations de la commission, les liens familiaux de M. Kohler avec l’armateur n’avaient jamais été mentionnés.
Interrogé en mai 2018 par Mediapart, le numéro deux de l’Élysée avait affirmé s’être « toujours déporté » (s’être écarté des débats, ndlr) quand il avait eu à connaître, comme haut fonctionnaire, des dossiers concernant MSC.
Une première plainte pour « prise illégale d’intérêt » et « trafic d’influence » avait été déposée le 4 juin 2018 par Anticor. Cette dernière avait ensuite déposé deux autres plaintes, en août 2018 à la suite de nouvelles révélations de Mediapart, puis en mars 2019, notamment pour « faux et usage de faux » et « omission substantielle de ses intérêts ».
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