Fronde contre l’Islande, fervent défenseur de la chasse commerciale à la baleine

A Portoroz (Slovénie), où se réunit cette semaine la Commission baleinière internationale (CBI), de nombreux pays ont critiqué mercredi à la tribune la position islandaise.

« Nous sommes très déçus par le fait que l’Islande, un pays connu pour être favorable à la protection de la nature, poursuive la chasse à la baleine », a déclaré le responsable de la délégation américaine Ryan Wulff.

L’Italie, comme les autres pays de l’Union européenne, a dit « espérer que le gouvernement islandais soutiendra à l’avenir les efforts pour préserver les baleines ».

L’Argentine, le Brésil, l’Equateur, la Colombie, le Chili, le Pérou ont aussi tenté de faire pression sur l’Islande, dans le sillage d’un appel lancé lundi par l’UE, les USA et d’autres pays (Israël, Australie, Nouvelle-Zélande, Mexique, etc.) pour que ce pays cesse de traquer les cétacés près de ses côtes.

En 2013, l’Islande a pris 169 baleines. Une partie est destinée à la consommation alimentaire et à la fabrication de produits dérivés, une autre partie est vendue aux Japonais.

Le chef de la délégation islandaise à Portoroz, interrogé par l’AFP, a dit « ne pas comprendre l’émotion suscitée par la chasse aux baleines ». « Nous estimons que cela fait partie de nos ressources, nous croyons à la gestion durable des ressources marines et nous pratiquons une chasse qui n’épuise pas les stocks », a-t-il affirmé. « Les baleines que nous chassons sont abondantes », a-t-il assuré.

Selon Vincent Ridoux, spécialiste des cétacés et membre du comité scientifique de la Commission baleinière, « les populations de baleines sont évaluées, mais le comité scientifique n’est pas chargé d’estimer le niveau de captures qui serait soutenable pour chaque espèce ».

« Comme il y a un moratoire sur la chasse commerciale depuis 1986, la Commission baleinière ne se place pas dans la perspective d’une pêche possible », explique le chercheur à l’université française de La Rochelle.

– Soutien des pays baleiniers –

Du coup, l’Islande décide elle même de son quota annuel. Pour contourner le moratoire, instauré par la CBI, Reykjavik s’appuie sur la possibilité de s’opposer à cette disposition, à l’instar de la Norvège, qui pratique aussi la chasse commerciale.

« Contrairement à la Norvège, l’Islande est dans l’illégalité au regard du droit international », fait valoir Kitty Block de l’ONG Humane society international. « La possibilité d’émettre une réserve au moratoire était possible lorsqu’il a été mis en place par consensus ou lorsqu’un nouveau pays rejoint la CBI », explique l’avocate.

« L’Islande a accepté le moratoire, puis a quitté la CBI, et lorsqu’elle est revenue en 2002, elle a émis une réserve: cette conduite est sans précédent dans le droit international qui s’appuie sur une démarche sincère des pays », estime Kitty Block.

De nombreux pays de la CBI estiment donc que l’objection de l’Islande au moratoire n’est pas valable.

Mercredi, les Islandais ont reçu, sans surprise, le soutien des pays baleiniers: le Japon (chasse supposée scientifique), la Russie (au titre de la chasse aborigène), et la Norvège (chasse commerciale). « Il y a une focalisation sur ce pays », a déploré le commissaire russe Valentin Ilyashenko, alors que « le comité scientifique n’apporte pas de preuve sur l’impact de la chasse ».

Si les Islandais étaient sous le feu des critiques, certains observateurs à la CBI faisaient remarquer que la Norvège était épargnée, alors qu’elle pêche beaucoup plus que l’Islande: près de 600 cétacés en 2013.

« Le Japon prend le plus de coups parce qu’il utilise l’alibi de la chasse scientifique pour des fins commerciales et parce qu’ils vont en Antarctique où il y a un sanctuaire baleinier, l’Islande est visée parce qu’ils sont dans l’illégalité », analyse Kitty Block (HSI). « Il est plus difficile d’attaquer la Norvège mais », dit-elle, « leur chasse, même légale, reste problématique ».

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