Lors d’une conversation téléphonique d’une dizaine de minutes, le chef du gouvernement britannique a exprimé ses « vives inquiétudes » à propos des longues files d’attente à la frontière entre l’Espagne et Gibraltar et de l’éventualité évoquée par Madrid d’instaurer un droit de péage à l’entrée et à la sortie du territoire.
David Cameron a indiqué que « le problème ne devrait pas endommager nos relations bilatérales, mais qu’il y avait un réel risque que cela se produise à moins que la situation à la frontière ne s’améliore », a indiqué un porte-parole de Downing Street.
Le Premier ministre britannique a aussi réaffirmé que la position de Londres sur la souveraineté de Gibraltar – situé à l’extrême sud de la péninsule ibérique – et sur ses eaux environnantes « ne changerait pas ».
La tension autour de l’enclave rocheuse de 7 km2 est montée d’un cran fin juillet lorsque les autorités de Gibraltar ont décidé de construire un récif artificiel en béton dans la Méditerranée, pour mettre fin aux incursions dont elles accusent les pêcheurs espagnols.
Gibraltar affirme que l’Espagne a multiplié les contrôles à la frontière par mesure de représailles. A quoi Madrid rétorque que ces contrôles sont obligatoires – puisque Gibraltar, comme le Royaume-Uni, n’appartient pas à l’espace Schengen – et nécessaires pour lutter contre la contrebande.
Lors de sa conversation avec David Cameron, Mariano Rajoy a jugé « inacceptable » la décision « unilatérale » des autorités de Gibraltar d’installer des blocs de béton dans la baie d’Algeciras.
Le ministre espagnol des Affaires étrangères José Manuel Garcia-Margallo, qui avait menacé dimanche d’imposer des mesures à la frontière avec Gibraltar dont un droit de péage de 50 euros, et son homologue William Hague, ont été chargés de dialoguer pour tenter de calmer la situation.
Les deux chefs de gouvernement conservateurs ont eux-mêmes semblé désireux de faire baisser la tension. David Cameron a estimé dans un tweet que la discussion avait été « constructive » et Mariano Rajoy s’est, selon Londres, « engagé à réduire les mesures à la frontière ».
« Les relations bilatérales entre l’Espagne et le Royaume-Uni sont celles de pays partenaires, amis et alliés, ce qui implique que les conflits qui apparaissent entre eux doivent être gérés avec honnêteté et transparence, dans un dialogue s’inscrivant dans le respect de la légalité internationale, européenne et nationale », a de son côté indiqué le gouvernement espagnol.
Cherchant l’apaisement, la Commission européenne a proposé mardi de dépêcher en septembre ou octobre un groupe d’experts à la frontière entre l’Espagne et Gibraltar, pour vérifier si les contrôles sont « proportionnés » et si les temps de passage sont « excessifs ».
Madrid a adopté une position plus ferme à l’égard de Gibraltar dès l’arrivée au pouvoir du gouvernement de droite de Mariano Rajoy à la fin 2011.
La question des droits de pêche est un motif de discorde récurrent entre Londres et Madrid qui réclame depuis longtemps le retour de Gibraltar, territoire stratégique cédé en 1713 par l’Espagne à la Grande-Bretagne, aux termes du Traité d’Utrecht.
Londres refuse, faisant valoir l’opposition de la population locale, environ 30.000 habitants, à une telle mesure.
Dans ce contexte de tensions, le gouvernement de Gibraltar a affirmé mercredi avoir reçu le soutien du gouvernement des îles Malouines, archipel de l’Atlantique Sud sous souveraineté britannique et revendiqué par l’Argentine, objet d’une guerre en 1982.
Par ailleurs, la police de Gibraltar a affirmé mercredi avoir arraisonné un bateau de pêche espagnol et arrêté trois Espagnols à bord et trois Gibraltariens dans le cadre d’une opération contre la contrebande de tabac.
Ces interpellations entrent dans le cadre « d’une opération pour combattre le trafic de tabac », a précisé la police de Gibraltar, qui a écarté tout lien avec la dispute entre Gibraltar et les autorités espagnoles sur la pêche.