Le Concordia a repris la mer pour son dernier voyage

« Il est difficile de ne pas être ému », a admis à la mi-journée Franco Porcellacchia, ingénieur de Costa Croisières, l’armateur du navire et l’un des acteurs de ce projet titanesque de sauvetage, encore jamais réalisé sur un bateau de cette taille.

« Ils l’ont fait, c’est incroyable », s’est écrié une femme sur le port, où touristes et habitants de l’île s’étaient massés depuis le matin.Aujourd’hui, le Giglio est à nouveau à nous », a lancé de son côté, un autre insulaire, visiblement soulagé.

Près de 500 ingénieurs et ouvriers, de toutes nationalités, ont travaillé pendant deux ans et demi sur l’île de Giglio, tissant des liens avec ses habitants, pour redresser en septembre la coque du paquebot, long comme deux fois le Titanic. L’épave a ensuite été renflouée, mètre par mètre pendant plus d’une semaine à la mi-juillet pour permettre son ultime traversée vers Gênes (nord-ouest), où le navire sera détruit.

Non loin du port, ces équipes techniques ont célébré la fin de cette mission hors normes autour d’une bouteille de spumante, fumant pour certains des cigares tandis que d’autres jouaient avec la reproduction miniature du paquebot, grand comme deux fois le Titanic.

« Aux environs de 11H00 (09H00 GMT) ce matin, le Concordia a commencé son voyage vers Gênes, à une vitesse moyenne de deux noeuds (3,7 km/h), où son arrivée est prévue samedi ou dimanche », a officiellement annoncé Costa dans un communiqué.

Ce départ, très attendu par les quelque 1.500 habitants de ce paradis touristique au coeur de la réserve naturelle de l’archipel toscan, a été salué par des sirènes de bateaux et les cloches des églises.

« Tout se déroule comme prévu, c’est un grand jour pour le Giglio, mais nous ne serons vraiment sereins qu’une fois arrivés à Gênes », a déclaré Nick Sloane, maître d’oeuvre de cette opération, au début des manoeuvres d’appareillage.

« Nous espérons qu’avec le départ de ce bateau, toutes les choses que nous avons en nous partiront également », a confié de son côté à l’AFP Anne Decré, du collectif français des survivants du Concordia.

Avant d’ajouter: « que ce bateau poursuive sa route, afin que nous puissions continuer la nôtre », en serrant les mains de son amie Nicole Servel, qui a perdu son mari la nuit du naufrage.

– « Satisfaction mesurée et sobre » –

La catastrope avait fait 32 morts et des dizaines de blessé parmi les plus de 4.200 passagers et membres d’équipage de 70 nationalités qui se trouvaient à son bord.

Le chef de la Protection civile italienne, Franco Gabrielli, qui a supervisé toute l’opération de sauvetage depuis deux ans et demi, a appelé à une « satisfaction mesurée et sobre » lors d’une conférence de presse.

Tirée par deux puissants remorqueurs,l’épave du paquebot, long de près de 300 mètres et pesant quelque 114.500 tonnes, est escortée par 12 autres embarcations tout au long d’une navigation de près de 280 km.

Il passera à 25 km de la Corse, près de l’île d’Elbe, avant d’arriver dans les chantiers navals du port de Gênes.

La ministre française de l’Ecologie Ségolène Royal a promis de surveiller le passage du paquebot à bord d’un navire au large de la Corse, provoquant l’agacement des autorités italiennes, qui jugent avoir fait tout ce qu’il fallait pour éviter un nouveau drame.

Au cours du trajet, les différentes embarcations faisant partie du convoi seront chargées de collecter d’éventuels débris flottants -valises, meubles, vêtements-, de contrôler la qualité des eaux et de prévenir les cétacés, nombreux en cette période de l’année, de l’approche du Concordia.

Barrages anti-pétrole et appareils à infra-rouge détectant la nuit toute trace d’hydrocarbure à la surface de l’eau seront également embarqués à bord.

Menée par l’armateur italien Costa Croisières (filiale du groupe américain Carnival) et effectuée par le consortium américano-italien Titan-Micoperi, l’opération de sauvetage du paquebot a coûté au total quelque 1,5 milliard d’euros.

Alors que d’autres membres de l’équipage ont négocié des peines à l’amiable, le commandant du paquebot, Francesco Schettino, est le seul à être actuellement jugé à Grosseto (centre) pour homicides par imprudence, naufrage et abandon de navire.

ide/lrb/ob/LyS

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