Pourquoi le Japon demande-t-il l’extradition de l’écologiste Paul Watson ?

Paris, 18 oct 2024 (AFP) – Farouche opposant à la chasse à la baleine détenu au Groenland, le militant écologiste Paul Watson a demandé l’asile politique en France à Emmanuel Macron. Il espère éviter d’être extradé au Japon, qui le poursuit pour des faits vieux de 14 ans. Voici les principaux enjeux autour de cette affaire.

– Qu’est-il reproché à Paul Watson ?

L’Américano-canadien de 73 ans, fondateur de Sea Shepherd et de la fondation qui porte son nom, a été arrêté le 21 juillet, en route avec son navire, le John Paul DeJoria, pour intercepter un navire-usine baleinier nippon.

Les autorités japonaises l’accusent d’être co-responsable de dommages et de blessures lors de deux incidents dans l’océan Antarctique en 2010.

Des faits pour lesquels un ancien compagnon de route de Watson, le Néo-zélandais Peter Bethune, a été condamné en juillet 2010 à deux ans de prison avec sursis après avoir plaidé coupable.

Plus précisément, selon Sea Shepherd France et ses avocats, Paul Watson est poursuivi pour des blessures qui selon l’accusation auraient été infligées le 11 février 2010 à un marin du bateau Shonan Maru 2 par une puissante boule puante contenant de l’acide butyrique, que l’on trouve par exemple dans le beurre rance.

Il est également poursuivi, selon les mêmes sources, au sujet de l’abordage quatre jours plus tard du baleinier Shonan Maru 2, à bord duquel Peter Bethune était monté pour présenter la facture de son bateau, l’Ady Gil, un trimaran noir au design futuriste.

Celui-ci avait été grièvement endommagé un mois plus tôt en mer, le 6 janvier 2010, lors d’une collision retentissante, après avoir été violemment percuté par le Shonan Maru 2.

Le 15 février 2010, arrivé sur un jet-ski, Peter Bethune était monté à bord du navire après avoir coupé au couteau un filet anti-intrusion. Une « destruction de bien » en lien avec laquelle Paul Watson est aujourd’hui poursuivi, selon ses avocats.

Selon ses soutiens, Paul Watson est en outre poursuivi pour « obstruction aux affaires », sans précision de dates.

– Quelle est sa défense ?

Les avocats du militant écologiste, qui aurait saboté et coulé de nombreux navires de pêche commerciale, déploient une large palette d’arguments, allant du non-respect de ses droits fondamentaux à des éléments provenant de l’analyse des images des incidents.

Mettant en cause le système pénal japonais, ils soulignent notamment que Peter Bethune, « broyé » par des mois de détention provisoire, est revenu sur ses déclarations impliquant Paul Watson.

Ils invoquent des images montrant des membres de l’équipage du Shonan Maru 2 qui semblent être atteint par leurs propres tirs de gaz lacrymogène à cause du vent.

« Il est très clair que les membres de l’équipage ont été atteints par leurs propres gaz lacrymogènes », a expliqué mercredi lors d’une conférence de presse son avocat danois, Jonas Christoffersen.

Selon lui, les images permettent d’établir que cet incident s’est déroulé « environ une minute et demie avant que la boule puante a été lancée » sur le navire nippon.

Lors des deux incidents, Paul Watson se trouvait sur un autre bateau.

– Quid de la demande d’asile politique ?

Sea Shepherd France affirme avoir transmis à Emmanuel Macron une lettre manuscrite de Paul Watson, datée du 4 octobre, dans laquelle il demande l’asile politique à la France.

Mercredi, l’un des conseils de Paul Watson, l’avocat français Jean Tamalet, a estimé que cette demande avait une « valeur hautement symbolique, très forte, très puissante ».

Elle ne doit toutefois « pas être interprétée comme une fuite en avant face à l’adversité judiciaire en cours », « dont on espère sortir par la grande porte », a-t-il poursuivi.

Quant à la position de la France, elle n’est pour l’heure « pas tranchée », a déclaré jeudi la porte-parole du gouvernement Maud Bregeon.

Dès le 23 juillet, l’Elysée avait indiqué qu’Emmanuel Macron suivait « la situation de près » et intervenait « auprès des autorités danoises » pour éviter son extradition vers le Japon.

Les avocats de Paul Watson espèrent une décision du ministère danois de la Justice, dont dépend le Groenland pour cette demande d’extradition, dans les prochaines semaines. Selon Sea Shepherd France, la partie technique de la demande d’asile politique n’a pas encore été « amorcée ».

Celle-ci se heurte à un problème de droit, a relevé vendredi le ministre français des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot, car « en principe, une demande d’asile ne peut être faite que sur le sol du pays dans lequel cette demande est faite ».

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