Le Pen à l’écoute des pêcheurs et agriculteurs en colère

Erquy (France), 14 jan 2022 (AFP) – Marine Le Pen est venue vendredi dans les Côtes-d’Armor, à Erquy, pour entendre la colère de pêcheurs opposés aux éoliennes prévues dans la baie, « une aberration », et celle d’agriculteurs désireux de voir les candidats à la présidentielle parler de leurs difficultés et « pas que du Covid ».

Chaussée de bottes, la candidate du Rassemblement national arpente les sentiers du cap d’Erquy au large duquel est prévue la construction de 62 éoliennes de 200 mètres de haut, à 16 kilomètes des côtes. D’une capacité totale de 496 MW, ce parc est censé produire l’équivalent de la consommation électrique annuelle de 835.000 habitants, selon son promoteur Ailes Marines.

Julien Tréhorel, patron pêcheur de coquilles Saint-Jacques, produit phare de ce port breton, montre l’horizon à Marine Le Pen. « C’est exploité par une pêche durable et artisanale, et on nous chasse de cette zone pour implanter les éoliennes », déplore-t-il, en évoquant « une privatisation de l’horizon »

« Il y a une volonté manifeste de mentir aux pêcheurs », lui répond la candidate d’extrême droite qui promet « d’arrêter » le projet si elle est élue, en dénonçant un projet éolien « ruineux pour l’environnement, pour les finances », qui « détruit les paysages » et « va mettre au tapis (…) la pêche artisanale ». « C’est presque un crime », avance-t-elle.

A la place de l’éolien, elle défend le nucléaire. L’électricité produite par le parc doit être revendue à l’Etat 155 euros le MWh au lieu de 45 à 47 euros pour celle des centrales nucléaires, affirme-t-elle.

– « Escroquerie » –

Sur le port, Marie-Laure Blin, femme de marin pêcheur, est venue rencontrer la candidate. « C’est une aberration totale, c’est une histoire d’argent tout simplement », s’exclame-t-elle, en évoquant le « bruit » des travaux, les câbles qui traversent la plage. Si le projet aboutit, « un jour il y en a un qu’on retrouvera pendu à son mât », estime la jeune femme, émue.

« On a bien vu l’année dernière qu’on n’avait pas d’araignées devant (la plage de) Caroual », ajoute Quentin Emeriau, patron pêcheur avec sa petite fille dans les bras. Et la coquille, « elle n’a pas de nageoires, elle ne va pas pouvoir se barrer », ironise à ses côtés Yann, un autre patron pêcheur.

« C’est la plus grande escroquerie du siècle », affirme Marine Le Pen. « On a oublié de dire (aux Français) que les éoliennes étaient importées, que ça avait une influence sur la biodiversité, que les prix des maisons s’effondraient et que ça allait avoir des conséquences sur le tourisme et qu’il y avait des risques pour la santé ».

Après « l’arrêt » des projets et le « démantèlement » des éoliennes existantes au terme de leur fonctionnement, la candidate veut aussi aller « chercher les responsabilités » car des « dirigeants auront des comptes à rendre ».

En reprenant sa voiture, Marine Le Pen est interpellée par des agriculteurs qui ont réuni une quinzaine de tracteurs et barrent la route entre le port et la plage du centre d’Erquy.

– « Souveraineté » –

« Egalim 2, qui jouera le jeu » peut-on lire sur une banderole en référence à la loi adoptée en octobre visant à protéger la rémunération des agriculteurs en régulant davantage les relations commerciales entre industriels et distributeurs.

« C’est la grande distribution qui mène la loi Egalim. (…) Que ce soit vous ou les autres, vous ne prenez pas le sens de la gravité » de la situation, lance à la candidate Jérémy Labbé, éleveur de porcs à Plurien et président des Jeunes agriculteurs du département.

« Personne ne parle agriculture dans la campagne. (…) On ne peut pas parler que Covid », ajoute-t-il.

Marine Le Pen lui assure être « consciente du rôle de la grande distribution » et que le « rapport de force (est) complètement déséquilibré » en faveur de celle-ci.

« Derrière l’agriculture, ce n’est pas seulement la survie d’un secteur qui est en jeu mais la souveraineté de la nation », ajoute la candidate en vantant le « rôle d’arbitre » de l’Etat dans la fixation des prix, « pour ne pas laisser les forces libres du marché déterminer si demain on va se nourrir ».

Au final « le problème, ce n’est pas la loi mais la volonté politique », dit-elle.

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