Les troupes chinoises ne remplaceront pas les Indiens, assure le président des Maldives

Malé (Maldives), 15 nov 2023 (AFP) – Le nouveau président des Maldives, Mohamed Muizzu, s’est engagé à expulser les troupes indiennes dès son entrée en fonction à la fin de la semaine, mais a déclaré à l’AFP qu’il ne voulait pas redéfinir l’équilibre régional en invitant à la place des forces chinoises.

L’archipel des Maldives occupe une place stratégique dans une zone géographique très convoitée dans l’océan Indien, se situant sur l’une des routes maritimes les plus fréquentées du monde.

« Les Maldives sont trop petites pour être mêlées à une rivalité géopolitique », a déclaré dans un entretien le président élu. « Je ne souhaite vraiment pas y impliquer la politique étrangère des Maldives ».

La victoire électorale de M. Muizzu en septembre reposait sur une campagne soutenue contre l’influence politique et économique démesurée de l’Inde aux Maldives, et plus particulièrement sur sa promesse d’expulser les forces indiennes.

Mais le nouveau dirigeant a affirmé qu’il ne permettrait pas à la Chine, ni à aucun autre pays, de prendre leur place, rejetant les informations qui le disent enclin à se rapprocher de Pékin. Il est « pro-Maldives », uniquement.

« Nous allons travailler avec tous les pays, l’Inde, la Chine et avec tous les autres », a affirmé le dirigeant de 45 ans, qui prêtera serment vendredi, à son domicile dans la capitale Malé.

– Rivalité régionale –

Le président élu souhaite entamer des négociations formelles avec New Delhi pour le retrait de 50 à 75 militaires indiens environ.

« Le peuple des Maldives n’a pas voté pour que j’autorise une quelconque présence militaire aux Maldives », a ajouté cet ingénieur du génie civil, formé au Royaume-Uni.

« C’est la raison pour laquelle nous discutons de leur retrait avec le gouvernement indien, et je suis certain que nous pouvons le faire de manière pacifique et démocratique », a-t-il expliqué.

Selon M. Muizzu, il a pour mandat le retrait d’une unité de personnel de sécurité indien, déployée pour piloter trois avions offerts aux Maldives permettant des patrouilles sur son vaste territoire maritime.

« Je ne demande pas aux troupes indiennes de quitter notre pays pour qu’elles laissent le champ à un autre pays qui pourrait y amener ses troupes militaires », a-t-il souligné.

L’Inde, puissance régionale, considérait que les Maldives, avec sa population d’environ 380.000 musulmans sunnites, entraient dans sa sphère d’influence mais s’est inquiétée de l’influence croissante de la Chine sous l’administration de l’ancien président Abdulla Yameen (2013-2018).

New Delhi a déjà connu des démêlés avec Malé, notamment sur le déploiement de soldats indiens pour contrecarrer une tentative de coup d’Etat de 1988.

– Maldives d’abord –

« Pour les Maldives, il est très important que nous donnions la priorité à nos intérêts (…) Nous voulons également travailler avec tous les pays, avoir de bonnes relations, amicales, cordiales et franches », a fait valoir M. Muizzu.

Quand il était ministre du Logement, il avait mis en oeuvre des projets d’infrastructure financés par la Chine, dont un pont reliant l’île de Malé à l’île aéroportuaire voisine de Hulhule.

Il compte achever l’expansion de l’aéroport international Velana, dans le but de relancer une économie marquée par une forte dette et frappée par le déclin du tourisme depuis la pandémie de Covid-19.

L’archipel, qui se compose de 1.192 îlots coralliens disséminés sur quelque 800 kilomètres dans l’océan Indien, est un haut lieu du tourisme de luxe et une destination de choix pour les célébrités et riches personnalités du monde entier.

M. Muizzu espère combler les « déficits de financement » pour l’agrandissement de l’aéroport international, d’un coût d’un milliard de dollars, et sur lequel il compte pour attirer davantage d’investissements directs étrangers.

« Nous sommes situés dans une région très stratégique, où de nombreuses voies de communication maritimes traversent notre pays », a-t-il souligné.

– La montée des eaux –

Mais la dette publique du pays s’élevait à environ 7 milliards de dollars, soit 113,5 % du PIB à la fin de l’an dernier, selon les données officielles.

« Quant à l’économie, il faut s’occuper d’une énorme dette. Le niveau de confiance des investisseurs pour venir aux Maldives est vraiment faible », a-t-il ajouté.

Il a dit souhaiter développer les ports et les services portuaires afin d’augmenter les recettes du pays, mais il recherche du financement sans dette pour ses ambitieux plans d’expansion économique.

Selon M. Muizzu, jusqu’à 500 millions de dollars de financement international sont nécessaires pour protéger les plages et les coraux, menacés par le réchauffement climatique et la montée des eaux.

Environ 80% de l’archipel des Maldives sont situés à moins d’un mètre au-dessus du niveau de la mer, en faisant l’un des pays les plus menacés par la hausse du niveau de la mer en raison du changement climatique.

Le président élu a déploré que 60% des coraux ont blanchi à cause de la hausse de la température de l’eau.

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