La suppression de ce titre de séjour spécifique est très attendue par les habitants de Mayotte qui y voient une injustice et un manque de solidarité de la France métropolitaine face à l’afflux massif d’immigrés clandestins venus notamment des Comores voisines.
Trois amendements identiques (de LFI, du groupe écologiste et de la députée de Mayotte Estelle Youssouffa) proposaient une abrogation immédiate.
« L’Etat utilise notre insularité pour transformer Mayotte en cocotte-minute et isoler le problème migratoire en fixant la population comorienne sur notre île », a dénoncé Mme Youssouffa.
« Il n’est pas acceptable que le reste du territoire national ne prenne pas sa part du sujet migratoire qui déstabilise complètement notre département », a ajouté l’élue mahoraise, également co-rapporteure du projet de loi-programme, qui a finalement retiré son amendement au profit de celui d’un autre co-rapporteur, le député LR Philippe Gosselin.
Son amendement a fait consensus et été adopté. Il prévoit l’abrogation du titre de séjour territorialisé à compter de 2030.
« Nous devons envoyer un vrai signal », selon M. Gosselin, mais aussi « donner du temps au temps », et que les dispositifs de lutte contre l’immigration illégale prévus dans cette loi fassent effet.
La prise de parole de la députée de La Réunion Emeline K/Bidi opposée à l’abrogation immédiate, une position à contre-courant de son groupe (GDR), a été particulièrement remarquée.
Celle-ci a fait valoir qu’en l’état, la fin de ce titre de séjour spécifique déplacerait le problème migratoire non vers l’Hexagone – mais vers l’île de la Réunion – voisin de Mayotte dans l’océan Indien qui entretient des liens très forts avec – et alors même que son département est déjà le troisième plus pauvre de France.
– Inquiétudes de La Réunion –
Le ministre des Outre-mer Manuel Valls a salué « la hauteur » des débats ainsi que la position commune trouvée entre tous les rapporteurs du texte avec cet amendement qui fait « oeuvre utile », selon ses mots. Il a aussi rappelé l’opposition du ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau à cette abrogation.
Plus tôt, les députés ont adopté un rapport annexé détaillant les engagements, notamment financiers, du gouvernement. Près de 4 milliards d’euros sur sept ans sont ainsi prévus.
Ce rapport contient par ailleurs des engagements en matière de convergence sociale, alors que le RSA est par exemple deux fois plus bas que dans l’Hexagone.
Mais il n’a toutefois pas de valeur contraignante.
Plus tôt, en commission des Affaires économiques cette fois, les députés se sont attaqués à un autre fléau, l’habitat informel.
Ils ont donné le feu vert à une mesure qui permet à l’Etat d’ordonner la démolition dans un délai de 24 heures d’un habitat informel lorsque sa construction a été constatée il y a moins de sept jours, contre quatre jours actuellement.
Surtout, elle supprime l’obligation d’offrir une proposition de relogement ou d’hébergement d’urgence aux personnes délogées dans ce cas, une mesure particulièrement décriée par la gauche.
Dans un autre article, les députés ont réécrit une mesure facilitant les expropriations à Mayotte pour permettre à l’Etat la construction d’infrastructures essentielles, un article particulièrement irritant sur l’archipel.
Ils l’ont circonscrit aux infrastructures portuaires et aéroportuaires.
Les débats en commission des Lois doivent reprendre jeudi à 09H00. Près de 170 amendements restent à étudier.
Le projet de loi-programme du gouvernement pour « refonder » Mayotte, déjà approuvé au Sénat, doit arriver dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale à partir du 23 juin.