Chronique navale du 23 septembre

23 septembre 1338 : bataille navale d’Arnemuiden (actuels Pays-Bas).

Durant la guerre de 100 ans, la flotte française des amiraux Quiéret et Béhuchet attaque cinq navires anglais dans un port de l’île de Walcheren. Les Anglais se défendent vaillamment mais doivent se rendre étant en infériorité numérique. Les prisonniers anglais sont massacrés après les combats. Cette violence inutile fait scandale et coûtera finalement la vie deux ans plus tard aux deux amiraux français lors de leur capture à la bataille de l’Écluse (Picardie) en 1340.


23 septembre 1491 : Naissance à Saint Malo de l’explorateur et écrivain Jacques Cartier

Mandaté par le roi de France François 1er, il aborde en 1534 le golfe du Saint-Laurent et explore le territoire alentour qu’il nomme Canada (de l’iroquoien kanata, village).

Auteur de cartes, Cartier, par ses Relations, est le premier Européen à décrire et nommer ces eaux, leurs rives et leurs habitants. Il effectue un second voyage en 1535-1536 et un troisième en 1541-1542.


23 septembre 1568 : victoire espagnole, à la bataille de San Juan de Ulúa

Fin désastreuse de la campagne d’une flottille corsaire anglaise composée de 6 navires qui se dédia entre 1567 et 1568, violant systématiquement la trêve conclue entre Philippe II d’Espagne et Élisabeth 1ère d’Angleterre, à attaquer les villages côtiers et les navires marchands espagnols, la traite d’esclaves et le commerce illégal dans les eaux de l’Amérique espagnole.


23 septembre 1779 : bataille navale de Flamborough Head (Mer du Nord).

En pleine guerre d’indépendance des États-Unis d’Amérique, le héros américain John Paul Jones remporte au large des côtes du Yorkshire une des plus célèbres batailles navales de ce conflit, bien que la nature réelle des combats fasse encore l’objet de discussions. Commandant une escadre armée grâce à la France,  il intercepte un convoi de navires britanniques et s’empare du principal navire d’escorte, le Sérapis. Son propre navire de commandement le  Bonhomme Richard  est trop endommagé pour être sauvé mais Jones parvient à échapper avec son butin aux navires britanniques lancés à ses trousses. La vie de Jones est une aventure puisqu’il sera contre-amiral dans la flotte impériale russe de Catherine II (1788), combattra les Turcs en Mer noire et sera nommé consul des États-Unis à Alger. Héros américain, il était question qu’une statue le représentant soit érigée à Kronstadt en mémoire de son action au service de Catherine II…


23 septembre 1914 : prise de Cocobeach (actuel Gabon).

La canonnière La surprise a débarqué le 21, 250 hommes qui attaquent la petite garnison allemande présente sur place depuis 3 ans. Après de rudes combats, les Allemands capitulent. Un monument y commémore l’évènement depuis 1920.


23 septembre 1980 : décision de construire deux porte-avions nucléaires (Élysée – Paris).

En conseil de Défense, la décision est prise de doter la Marine de 2 porte-avions à propulsion nucléaire. Seul le Charles de Gaulle verra le jour.


23 septembre 1990 : arrivée du porte-avions Clemenceau dans le port de Yanbu (Sud-Est de l’Arabie saoudite)

et débarquement des hélicoptères et des troupes qui sont renforcés sur place par des éléments du 1er régiment d’hélicoptères de combat de Phalsbourg et du 3e régiment d’hélicoptères de combat d’Étain. Fin de l’opération Salamandre, début de l’opération Daguet.

La Task Force 623 en océan Indien
Sous le commandement du contre-amiral Jean Wild, ordre est donné à la Task Force 623, composée du porte-avions Clemenceau, du croiseur Colbert et du pétrolier-ravitailleur Var, de partir pour l’océan Indien. Les marins, qui ont l’habitude d’appareiller pour l’océan Indien où la flotte entretient une présence permanente, tiennent sans problème le délai requis de 72 heures. Le strict respect des périodes d’entretien – pour le Clemenceau en particulier – permet aux bâtiments d’être en bonne condition. De plus, la présence d’éléments de soutien à Djibouti, en particulier le bâtiment-atelier Jules Verne, facilite un départ rapide ; d’autres unités de soutien, le remorqueur Buffle et le pétrolier-ravitailleur Durance, rallieront par la suite. Seul le nombre limité de bâtiments antiaériens est un réel problème, car l’indisponibilité des trois unités les plus modernes impose de choisir le croiseur Colbert, dont ce sera la dernière mission. Le 13 août, les navires français quittent le port de Toulon dans une atmosphère de gravité qui rappelle que la guerre est dans tous les esprits.

Les hélicoptères à la manœuvre
Les hangars du porte-avions n’emportent pas les habituelles flottilles de Crusader et de Super Étendard, mais, à la place, les 42 machines du 5e Régiment d’hélicoptères de combat (5e RHC) : vingt Gazelle antichars, dix autres de reconnaissance et d’appui et douze Puma de transport. Les camions d’une compagnie du 1er Régiment d’infanterie (1er RI) sont aussi parqués sur le pont d’envol, sans toutefois empêcher la manœuvre des Alizé de l’aéronavale. Porte-avions, porte-hélicoptères, porte-camions… ce dispositif suscite étonnements et critiques incisives de la presse et d’une partie de l’opposition. Pourtant, la Marine et l’aviation légère de l’armée de Terre (ALAT) ont l’habitude de s’exercer ensemble et le groupe ainsi constitué possède une valeur opérationnelle indéniable. Face à la menace d’une offensive irakienne dans le désert, le couple Gazelle-missile Hot serait bien plus efficace comme « tueur de chars » que des chasseurs-bombardiers. De plus, ce choix traduit précisément la position diplomatique française à ce stade, comme le souligne le contre-amiral Pierre Bonnot, Alindien à l’époque : « Un régiment d’hélicoptères, arme défensive contre une attaque de blindés, incarne un degré d’agressivité moindre qu’une [flottille] de chasseurs-bombardiers embarqués. » Les arguments ne manquent donc pas pour justifier l’opération. Encore faut-il les exposer aux commentateurs et accompagner les manœuvres militaires sur le plan médiatique. Une nécessité d’autant plus grande que l’effet recherché est d’abord politique.  

Un parti pris payant
De fait, Salamandre remplit bien ses deux objectifs principaux : l’engagement auprès des monarchies du Golfe et l’ouverture du théâtre. Le transit aller est l’occasion d’effectuer de nombreux exercices aériens et de s’entraîner à faire face aux menaces chimiques ou terroristes. Ainsi, la traversée du canal de Suez se fait au poste de combat et, en l’absence de caméras thermiques à bord, on dispose les postes de tir Milan du 1er RI dans des casemates improvisées sur le pont pour utiliser leur optique infrarouge. Puis l’escale à Djibouti permet d’acclimater le 5e RHC au milieu désertique et aux températures extrêmes : 50 °C à l’ombre ! Début septembre, le groupe se positionne en mer d’Oman à une vingtaine de nautiques des côtes pour permettre aux hélicoptères de participer à des manœuvres aux Émirats arabes unis et au Sultanat d’Oman. Enfin, cette présence sur zone permet de répondre très rapidement au pillage de l’ambassade de France à Koweït-City, le 15 septembre. La TF 623 est immédiatement déroutée vers Yanbu où le 5e RHC est projeté trois jours plus tard ; une escale permet de débarquer le reste des forces de l’ALAT pendant que des renforts commencent à affluer de France. L’opération Salamandre fait ainsi la liaison avec l’étape suivante de l’engagement français dans le conflit, l’envoi de la division Daguet. Mission accomplie, la Task Force rentre à Toulon le 5 octobre.

Par rapport à d’autres déploiements opérationnels des porte-avions français, Salamandre fait figure de mission incomprise, d’une part du fait de l’absence de l’emblématique groupe aérien embarqué et, d’autre part, parce qu’elle concrétise une position diplomatique française marginalisée par la suite des événements. Elle mérite cependant d’être considérée comme une mission de diplomatie navale bien conçue dans le contexte de l’été 1990. Elle offre également un exemple original des synergies qu’offre la mise en œuvre des hélicoptères de l’ALAT depuis les plates-formes de la Marine. Une combinaison dont la valeur s’est révélée avec la mise en œuvre des porte-hélicoptères amphibies lors de l’opération Harmattan, en 2011, cette fois dans un contexte beaucoup plus guerrier.

Dominique GUILLEMIN, SHD, Cols bleus n°3082 (octobre 2019)

Crédit : Marine nationale.

 

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