Scepticisme en Russie après la réduction des charges contre Greenpeace

Les 30 membres de l’équipage de Greenpeace, détenus depuis fin septembre après l’abordage d’une plateforme pétrolière russe dans l’Arctique, ne sont plus accusés de « piraterie » mais de « hooliganisme ».

Ils encourent désormais jusqu’à sept ans de camp, contre 15 ans auparavant.

« L’accusation a été modifiée, mais cela ne soulage pas leur sort: ils restent en prison », a déclaré à l’AFP un responsable de l’ONG écologiste, Alexeï Kisselev.

Le tribunal régional de Mourmansk a d’ailleurs confirmé jeudi en appel la détention provisoire des membres d’équipage de l’ONG jusqu’au 24 novembre, selon Greenpeace.

La Russie a renoncé à ses accusations « absurdes », mais « personne n’a dit qu’ils n’étaient coupables de rien », a souligné pour sa part Maria Lipman, du centre Carnegie à Moscou.

L’accusation de « hooliganisme » a été qualifiée de « disproportionnée » par Greenpeace qui a souligné que les personnes détenues « n’étaient pas plus des hooligans que des pirates ».

Pour Alexeï Kisselev, la décision de modifier l’acte d’accusation « pourrait être liée à la saisie du tribunal international du droit de la mer par les Pays-Bas », qui demandent la libération « immédiate » de l’équipage de l’Arctic Sunrise.

« Formellement, dès que les accusations de piraterie sont levées, cette affaire ne relève plus de la juridiction internationale », car « la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer ne contient aucune disposition sur le hooliganisme », a expliqué au quotidien en ligne gazeta.ru une juriste de la société russe Inmarin, spécialisée dans le droit de la mer, Victoria Jdanova.

Les autorités russes ont annoncé mercredi qu’elles boycotteraient le procès au tribunal international du droit de la mer, à Hambourg (Allemagne), saisi lundi par les Pays-Bas.

Par ailleurs, Moscou a indiqué « rejeter » la procédure judiciaire d’arbitrage, également entamée par La Haye, dans le cadre de laquelle la Russie et les Pays-Bas doivent nommer des arbitres chargés de trouver une issue à l’affaire de l’Arctic Sunrise.

« La grande attention que le monde porte à cette affaire semble avoir donné des résultats », estime Mme Lipman.

L’accusation de « piraterie » initialement retenue contre l’équipage, parmi lesquels un cuisinier, un médecin et deux journalistes free-lance, a été vivement dénoncée par les défenseurs des droits de l’homme russes et internationaux et a fait l’objet de nombreux sarcasmes sur les réseaux sociaux.

« Les enquêteurs ont enfin compris que leur idiotie était une honte pour nous tous », a ainsi réagi l’opposant russe numéro un, Alexeï Navalny, sur Twitter.

Le président Vladimir Poutine avait lui-même estimé en septembre que les militants de Greenpeace n’étaient pas des « pirates », même s’ils avaient enfreint la loi en tentant de « s’emparer » d’une plateforme pétrolière.

« Poutine a dit que ce n’était pas de la piraterie, et les enquêteurs ont finalement tenu compte de ses propos », estime Mme Lipman.

« Je ne suis pas sûre qu’ils seront condamnés à des peines fermes. Cela pourrait être avec sursis (…). En tout cas, ce n’est pas le juge qui va en décider, la décision sera prise au niveau politique », a-t-elle ajouté.

L’équipage du Arctic Sunrise, battant pavillon néerlandais, avait été arraisonné par les garde-côtes russes en mer de Barents après que des membres de l’équipage eurent abordé une plateforme pétrolière pour tenter d’y déployer une banderole dénonçant les risques écologiques dans l’Arctique liés à l’extraction du pétrole.

Les 30 membres d’équipage, parmi lesquels 26 étrangers de 18 pays différents, sont actuellement détenus à Mourmansk, dans le nord-ouest de la Russie. Tous les recours contre leur incarcération ont été jusqu’ici rejetés.

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