A pied, en kayak ou en hélico, les gendarmes veillent sur les huîtres de Noël

Avec la mortalité des huîtres juvéniles enregistrée ces dernières années, le précieux coquillage est devenu une denrée plus rare encore. Sa valeur a grimpé de 50% en cinq ans, exacerbant encore les convoitises, particulièrement dans le bassin de Marennes-Oléron, le plus important d’Europe, où les huîtres bénéficient du label d’Indication géographique protégée (IGP).

A l’approche des fêtes de fin d’année, période cruciale pour les ostréiculteurs, les huîtres sont donc aussi recherchées par les gourmets que par les voleurs. Mais les gendarmes, eux, sont sur le pied de guerre tout au long de l’année.

« Depuis 2011, les huîtres sont devenues notre priorité », explique à l’AFP le major Frédéric Taymont, commandant la communauté de brigades nautiques de La Rochelle et Royan. « Nous vivons toute l’année avec elles. Il n’y a pas une période où nous ne les surveillons pas. Surtout dans le secteur de Marennes-Oléron, qui concentre 70 à 80% des vols », souligne-t-il.

« Nous y avons d’ailleurs interpellé un homme sur la commune de La Tremblade, en début d’année 2014, après les fêtes donc. Mais nous ne délaissons pour autant pas le reste des 470 kilomètres de côtes du département où d’autres gisements existent », dans la baie de l’Aiguillon ou sur l’île de Ré, ajoute le major Taymont.

– Surveillance en kayak –

Depuis 2011 et le début des statistiques sur le sujet, le volume des coquillages volés a été divisé par trois: 69 tonnes la première année, 18 tonnes en 2012, 10 tonnes en 2013 et 2014 s’achèvera sans doute sur une douzaine de tonnes dérobées.

Pour les gendarmes, ces bons résultats sont le fruit d’un dispositif qui ne cesse de s’étoffer. « Nous ne sommes qu’une douzaine d’hommes au sein de la communauté de brigades, mais nous disposons d’un matériel adapté à tous les besoins: canots rapides, bateaux pneumatiques semi-rigides, une barge ostréicole et quatre kayaks de mer pour des arrivées furtives, surtout dans les canaux irriguant les claires » où la majorité des vols sont commis, explique le major Taymont.

« Sur treize vols constatés cette année, huit ont eu lieu dans ces bassins d’affinage. A terre, nous recevons également le renfort de plusieurs brigades territoriales et d’un hélicoptère », ce qui permet une surveillance de jour comme de nuit d’une zone pourtant vaste.

– De la coupelle à l’assiette –

Parallèlement à ces patrouilles, les gendarmes bénéficient depuis 2013 des renforts du fisc, des agents de la répression des fraudes et même de l’Inspection du travail, pour leur permettre de suivre les huîtres depuis leur naissance jusque dans l’assiette des amateurs.

« Nous intervenons à tous les niveaux de la chaîne, de l’achat de coupelles sur lesquelles sont fixés les naissains jusqu’aux restaurants ou aux marchés. A chaque fois, nous contrôlons la comptabilité », révèle le major.

Les militaires peuvent aussi compter sur le soutien du Comité régional de la conchyliculture (CRC), qui a mis en place un dispositif d’alerte interne comme celui qui existe déjà chez les petits commerçants. Lorsqu’un ostréiculteur constate une effraction ou une activité suspecte, il la signale immédiatement au CRC qui prévient aussitôt tous les professionnels et les forces de l’ordre par courriel ou SMS.

Mais le dispositif doit toujours évoluer pour s’adapter aux nouvelles techniques des voleurs. « Jusqu’à présent, les vols avaient lieu à marée basse. Mais nous avons constaté récemment que des gens passent quand la mer découvre les parcs à huîtres pour détacher les poches, puis reviennent à marée haute les récupérer avec des grappins », déclare M. Taymont.

Sans oublier les surprises que réserve internet. Les gendarmes ont récemment découvert sur un célèbre site de vente entre particuliers une annonce proposant des huîtres « en direct du producteur » à un prix défiant toute concurrence. Mais provenant d’un vendeur établi à plus de 50 km de la mer…

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