Protéger les tortues de mer

L’association grecque Archelon est engagée depuis de nombreuses années dans la protection des tortues marines caouannes. Je l’ai rejointe en Crète, pendant deux mois, durant l’été 2022. Récit. 

Par Isild Mabille du Chêne

Il existe aujourd’hui, dans le monde, sept espèces de tortues marines. Toutes sont en voie de disparition. Trois d’entre elles se trouvent en Méditerranée : la tortue Luth, la tortue verte et la tortue caouanne. Cette dernière, qui niche notamment sur les plages grecques, est extrêmement menacée. Chaque année dans le monde, des centaines de milliers de tortues de mer sont capturées involontairement, prises dans les filets ou les lignes de pêche. Ce phénomène que l’on appelle la « prise accessoire », est un danger important pour ces animaux qui se retrouvent dans l’impossibilité de rejoindre la surface pour respirer et finissent noyés.

L’association grecque Archelon a dédié son action à la protection des tortues caouannes. Son objectif : la préservation de leur nid et de leur habitat, ainsi que la prévention des menaces auxquelles elles sont exposées. La Grèce abrite les plages de nidification des tortues caouannes les plus importantes au monde. L’association anime ainsi onze projets pour la surveillance de ces plages situées en Crète, dans le Péloponnèse et dans la baie de Laganas. Archelon dispose aussi à Athènes d’un centre de sauvetage qui traite et réhabilite les tortues blessées.

Durant l’été 2022, nous avons été une trentaine de volontaires, venus de pays aussi divers que l’Allemagne, les Pays-Bas, le Canada, le Royaume-Uni ou le Brésil, à nous rendre à Réthymnon, en Crète, pour participer à l’action d’Archelon. Pour ma part, arrivée de France, je réalisais ce stage dans le cadre de mon Master 1 LEA en management des projets humanitaire et culturels, partagé entre Aix en Provence et Glasgow en Ecosse.

C’est dans un camp au bord de la mer, que nous avons posé nos affaires afin de débuter notre mission. Les journées débutaient à cinq heures et s’achevaient autour de 22 heures selon les tâches de chacun. En période de ponte, notre rôle était d’arpenter la plage étendue sur plus de 12 km entre les villes de Réthymnon et de Skaleta. Aux premières lueurs du jours, nous recherchions sur le sable les traces laissées par les tortues mères venues pondre durant la nuit. Celles-ci abandonnent en effet leur nid à l’aube. Une fois les œufs trouvés, nous les mettions à l’abri dans des cages destinées à indiquer leur présence aux vacanciers. Si leur emplacement restait trop exposé, nous les déplacions vers un endroit plus sûr.

Durant la période d’éclosion, soit 55 jours après la ponte, nous contrôlions pendant 10 jours l’activité de chaque nid. Cette étape, nécessitait de les ouvrir pour établir la présence ou l’absence de petits. Dans 75 % des cas, l’opération était une réussite : tous les œufs avaient éclos et les bébés avaient pu rejoindre la mer. Mais, en cas d’échec, une fouille des nids s’avérait nécessaire. Cela nous permettait de savoir quelles étaient les causes de cette absence d’éclosion : infection, prédation, inondation, etc. Nous aidions enfin les bébés, retenus par le sable, à rejoindre la mer.

Nous avons également activement participé aux actions de prévention et d’information menées par l’association. Installés dans un kiosque en bois situé sur le port de Réthymnon, nous avons sensibilisé le public à son action et l’avons mobilisé pour des dons ou l’achat de tee-shirts, de pendentifs, de crayons ou d’aimants à l’effigie de la tortue caouanne. Nous avons également mené notre action de sensibilisation dans les hôtels, le tourisme de masse constituant l’une des plus grandes menaces pour l’espèce.

Cette expérience, particulièrement enrichissante, m’a confortée dans la conviction, que j’avais déjà, de l’urgence à s’engager pour la nature.

Marine & Oceans
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